mercredi 25 mars 2015

Message de Mgr Urbain NGASSONGO pour le carême 2015



« Se convertir à l’Amour du Christ »


Préambule:

Le temps de carême n’est autre que ce temps de grâce que Dieu donne à son Église  et à chacun, afin que nous nous rapprochions  davantage de Lui. C’est un temps pendant lequel l’Église reprend une  nouvelle  fois  le  chemin  qui  monte  vers  Pâques.  Dans  son  Message  de  carême pour cette année 2015, le Pape François rappelle qu’il «  est un temps de renouveau pour l’Église, pour  les  communautés  et  pour  chaque  fidèle » (2  Co  6, 2).  Nous sommes donc invités tout au  long de ce temps, à méditer  profondément  sur les Paroles  du  Christ laissées  à  son  Église,  afin  qu’elles  éclairent notre itinéraire  spirituel  et  humain.  À  vrai  dire,  le  temps  de carême nous appelle à une vraie conversion intérieure et à une sincère ouverture aux autres. C’est dans ce sens que  Saint Jean Paul II dit: «   le temps de carême invite les chrétiens à un accueil plus généreux de ces paroles évangéliques,  pour les  traduire  en  interventions  courageuses  en  faveur  de  l’enfance  menacée  et abandonnée  ».  Il faut donc noter que ce carême 2015 n’est pas seulement un rappel des événements d’autrefois, mais il est surtout et avant tout un moment favorable de rencontre personnelle et communautaire avec le Christ, un “kaïrosˮ.

1.  Le sens des quarante jours de carême:

Le mot carême vient  du  latin quadragésima ; il signifie quarantième ; et donc quarantième jour. Ces quarante jours de grâce nous rappellent les quarante jours de Jésus passés au désert ; et aussi  les  quarante  années  de  la  marche  des  enfants d’Israël vers  la  terre  promise.  Une longue  et  pénible  marche,  durant  laquelle le peuple a eu faim et soif ; il est allé jusqu’à se détourner de Dieu, le Dieu  de ses pères. Cependant, de tout cela, nous devons ouvrir nos yeux à l’expérience qu’a connue ce peuple ;  une belle expérience   d’amour, de miséricorde, de tendresse et de fidélité de Dieu à son égard. Le carême c’est aussi cela : s’abandonner à la miséricorde de Dieu. Pour notre marche de cette année, nous vous proposons trois pistes de méditation qui peuvent bien nous aider à vivre ces jours dans une relation plus intime avec Dieu.


2.  Le carême comme temps de conversion:

« Se convertir à l’Amour du Christ » : voila ce qui doit être pour nous  un chemin quotidien. Et pour y arriver, l’Eglise nous propose plusieurs choses, parmi lesquelles : l’écoute  de  la  Parole  de Dieu et l’obéissance à l’Esprit Saint. Le temps de carême doit en effet, être caractérisé par ce désir de Dieu. Nous devons nous laisser conduire par Lui, tout en chassant nos principes de vie qui sont parfois trop rigides et durs. Nous ne sommes jamais seuls ; le Christ lutte et combat avec nous sans s’imposer. C’est en lui ouvrant les portes de nos vies, qu’Il peut dissiper les divisions qui minent nos familles et notre société.

La conversion à laquelle nous sommes invités, consiste à nous tourner vers Dieu et à nous efforcer grâce à Lui, à  participer à la construction de son  Royaume  dans nos milieux de vie, en posant des actes d’amour, de justice, de paix et de miséricorde. En terme clair, cette conversion doit  se manifester  par  des  attitudes nouvelles et par un regard de la vie éclairée par l’Esprit du Christ. C’est sur cette route que la plupart des Saints que l’Eglise nous propose en exemple, ont marché. Ils ont été des témoins visibles de l’Evangile du Christ ; et nous devons à notre tour, apprendre chaque jour, à vivre comme eux.

Le Seigneur  notre Dieu est Amour  (Cf. 1Jn 1, 14) ; l’Amour est son nom ; Il fait tout par amour pour les hommes, sans vouloir réclamer quoi que se soit de notre part. Le plus important pour Lui, c’est notre nouveau départ ; notre réponse à son appel à la sainteté. Le rappel de cet acte doit se faire régulièrement. Les prophètes dans l’Ancien Testament ont eu le mérite d’aider le peuple d’Israël à se souvenir de Dieu comme celui qui donne en temps voulu; et cela non sans amour. Leur message était plus accentué sur l’attitude envers Dieu et envers le prochain.  Durant ces jours de prière, de pénitence et de jeûne, nous devons apprendre à voir le visage de Dieu en toute chose, et  chercher à marcher avec Lui. Ces jours sont à  vivre avec une idée claire de ce que Dieu veut de nous : des hommes et des femmes dignes d’être appelés fils de Dieu.  Prenons donc conscience que nous sommes des chrétiens baptisés en l’Eglise une, sainte, catholique et apostolique, et que chaque jour nous sommes appelés à une conversion intérieure beaucoup plus profonde.
 La pénitence et la réconciliation sont des attitudes instituées par le désir de proximité et d’amour de Dieu.  Il s’agit d’un élan de cœur qui manifeste la recherche permanente de la vie en Dieu.  Revenons vers le Seigneur notre Dieu comme cet enfant prodigue de l’Évangile (cf. Lc 15, 11-32).


3.  Le carême comme temps de prière:

Les moments de prière des premières communautés chrétiennes (cf. Ac  2, 42s) peuvent bien nous aider à rencontrer réellement le Seigneur pendant ce temps de carême. Dans cet extrait des Actes des Apôtres, l’accent est mis sur l’assiduité à la prière et  à  la  fraction  du  pain.  L’important  dans  la  prière, n’est  ni  le langage, ni le genre littéraire, mais l’important réside dans la manière d’exposer nos intentions, pour qu’elles ne soient pas un simple exercice spéculatif, mais un vrai dialogue intérieur avec le Seigneur.  La prière est donc nécessaire pour notre croissance spirituelle et humaine. Saint Jacques le dit : «   si la sagesse fait défaut à l’un de vous, qu’il la demande au Dieu qui donne à tous avec simplicité et sans faire de reproche; elle sera donnée  » (Jc 1, 5).

La discrétion est aussi l’une  des postures de la prière. En fait, c’est Jésus lui-même qui nous invite à être discret: «  pour toi, quand tu pries, retire-toi dans ta chambre, ferme sur toi la porte, et prie ton   Père qui est là, dans le secret; et ton Père, qui voit dans le secret, te le rendra » (Mt 6, 5).  Il ressort que nous ne devrions pas prier pour être vu des autres. Ce qui est sûr,  c’est que quand nous prions discrètement avec foi et confiance, notre Dieu écoute et Il répond. Contrairement à la vision des pharisiens et des scribes, la vraie religion, c’est celle du cœur ; celle qui nous introduit dans le cœur à cœur avec Dieu, celle qui nous fait entrer dans sa vie par Jésus-Christ, notre Sauveur.

Le Christ, qui révèle à l’homme sa vraie nature (cf. GS, n°22, §1), est l’unique modèle à suivre pour le chrétien. Les saints eux, n’ont pas cessé un instant de s’inspirer de sa vie  et de ses enseignements. Ils ont mis leur foi en lui, et celui -ci les a aidés à vivre pleinement de la vie qui vient de Dieu. Pendant le carême, nous sommes  au  désert d’apprentissage, au désert de l’imitation de Dieu. Le Christ Lui-même, pendant l’exercice de son ministère,  n’avait  jamais négligé la prière. Il se retirait tout temps, pour prier à l’écart: «  Et après avoir renvoyé les foules, il monta dans la montagne pour prier à l’écart. Le soir venu, il était là, seul  » (Mt 14, 23).

La  recherche  de  Dieu  est  à  la  fois  un  exercice  individuel  et  communautaire. Autrement dit le cheminement personnel n’exclut pas celui communautaire avec toute l’Église, sa paroisse, sa communauté de base ou son mouvement d’apostolat. Les moments de prière ensemble permettent de manifester l’unité de l’Église et de marcher la main dans la main à la suite du Christ qui nous appelle tous à répondre à notre vocation  à  la  sainteté.  « Dans les formes diverses de vie et les charges différentes c'est une seule sainteté que cultivent tous ceux que conduit l'Esprit de Dieu et qui, obéissant à la voix du Père et adorant Dieu le Père en esprit et en vérité, marchent à la suite du Christ pauvre, humble et chargé de sa croix, pour mériter de devenir participants de sa gloire. Chacun doit résolument avancer, selon ses propres dons et ressources, par la voie d'une foi vivante qui stimule l'espérance et agit par la charité. » (LG, n°41).

Dans le but de montrer l’importance de la prière dans la vie de l’homme, Gandhi disait: «   sans  la prière j’aurai perdu la  raison. La paix vient de la prière. On peut vivre quelques jours sans manger et non sans prier. La prière est une alliance entre Dieu et les hommes  ».  On  peut  ajouter à ces mots que la persévérance dans la prière est l’expression de notre fidélité à Dieu. Aussi, sans  la prière, la vie divine ne saurait croître ou se maintenir en nous.  En fait, elle est un moyen fort pour  notre  renouvellement  et  notre  bien-être  spirituel.  C’est  par  elle  que  la  foi  est  vivifiée  et  que  les  bonnes  œuvres s’accomplissent.  Il  n’y  a  pas  de  christianisme  possible  sans  prière.  La communauté  primitive  des  Actes  des  Apôtres  se  réunissait  avant  tout  pour  la prière et le partage du pain (cf. Ac 2, 42 s).
4.  Le carême comme temps de partage dans l’humilité:

 A la notion de prière que nous venons de développer, il faut ajouter les dimensions de réconciliation et de partage, pour pouvoir équilibrer les choses. Parlant de la prière que Jésus nous a enseignée, Tertullien souligne que «   Prier ne suffit pas. Il faut aussi pratiquer l’hospitalité, partager le corps du Christ et nourrir les frères  ». La prière est importante dans la vie du chrétien, puisqu’elle nous fait entrer dans le cœur  Dieu, et donc dans la famille des enfants de Dieu : l’Église. En effet, notre désir de Dieu doit nous mettre sur la route de nos frères et sœurs, afin de partager avec eux ce que nous avons et ce que nous sommes. Le carême c’est aussi cela : s’engager pour soutenir ceux qui sont dans le besoin. C’est un temps où nous devons répandre  “l’Évangile de la charité  ˮ  en tous lieux ; d’autant plus que l’évangélisation passe aussi par la charité.

Par ailleurs, il faut noter que notre ouverture aux autres ne doit pas être cantonnée dans un territoire ou dans une région quelconque ; elle doit  plutôt aller  au-delà des  frontières  tribales  et  ethniques.  L’amour  de son  clan  ou  de son  ethnie ne doit pas freiner l’élan de cœur du chrétien vis-à-vis des autres membres de la grande famille des enfants de Dieu, se trouvant en dehors des repères de sa famille biologique. Il ne doit non plus être un obstacle au développement de nos sociétés.

Il est bien normal d’aimer les siens ; mais il est  encore plus normal et moral de s’ouvrir à toute personne que l’on rencontre ; de l’aimer comme frère  ou sœur, en toute sincérité et l’humilité. Le  Christ  nous invite  à aimer d’un amour vrai, sans hypocrisie et sans intérêt. De même, Le prophète Isaïe nous appelle  à partager avec celui qui a faim, à héberger le pauvre sans abri, à vêtir celui qui est nu (cf. Is 58, 7). C’est en acceptant de partager cette humanité commune avec les autres, par des actes concrets de générosité, de charité, de dialogue et de fraternité, que nos prières peuvent avoir un écho particulier devant le Seigneur. Faisons de notre temps  de  grâce, un vrai moment de jeûne  qui  plaît  au  Seigneur,  en  renonçant  à  nos représentations parfois non fondées de l’amour ; et en acceptant d’agir selon le cœur de Dieu.


Conclusion :

Dieu qui appelle et choisit,  a un projet de vie pour chacun. Par conséquent, nous avons l’obligation d’être à l’écoute de l’Esprit. Car, répondre à notre vocation chrétienne dans nos milieux de vie, est pour nous le seul moyen d’entrer dans le vouloir de Dieu. Nous pensons qu’une lecture quotidienne de la Parole de Dieu peut nous aider à grandir spirituellement  et  humainement.  Par une vie spirituelle équilibrée, nous  pourrons développer  harmonieusement  notre  société  et  nos  familles.  L’histoire  nous enseigne  que  bien des nations, surtout en Europe, ont été développées en majeure partie, grâce à un engagement particulier des nouveaux frères convertis au Christianisme. L’appel du Christ à partager sa vie divine, doit donc nous amener à communiquer la justice, l’amour et la paix.
Pour terminer, nous vous invitons  chers frère et sœurs, à vous unir à nous lors des croisades de paix que nous allons organiser pour demander à Dieu de faire don de sa paix à notre pays. Tournons-nous vers le Seigneur et implorons sa grâce sur nous, la grâce de la conversion, la grâce de nous aimer comme frères et sœurs, la grâce du vivre-ensemble, la grâce de la paix et de l’unité, la grâce de bâtir  ensemble  notre  jeune  diocèse.  Que  la  Vierge  guide  nos  pas  et intercède pour nous.



Bon temps de carême !
                                                                           


                                                                              Monseigneur Urbain NGASSONGO
                                                                              Evêque du diocèse de Gamboma



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